"Notre manière de faire fonctionne, personne ne s'en plaint". Philippe Barbier, président de la Confédération des grossistes de France (CGF) a partagé jeudi devant la presse son inquiétude du moment: "je ne voudrais pas qu'on prenne une balle perdue qui engendrerait des difficultés pour nos fédérations alimentaires".
En cause, l'appel de la grande distribution a étendre "aux acteurs de la restauration hors foyer (restaurants et restauration collective, ndlr), ainsi qu'aux grossistes industriels", les obligations des lois Egalim censées permettre une meilleure rémunération des producteurs agricoles dans le cadre des négociations annuelles entre les supermarchés et leurs fournisseurs agro-industriels.
L'idée ne ravit pas les grossistes. "Nous avons toujours évolué à part de ce que le gouvernement a essayé de réguler dans les discussions avec la grande distribution", explique Philippe Barbier.
Le gouvernement prévoit de présenter "d'ici l'été" un nouveau texte de loi pour "renforcer le dispositif Egalim".
Enorme secteur
Le secteur est gigantesque, selon sa confédération: 150.000 entreprises employant 1 million de personnes, comptant 60.000 camions en circulation pour 850 milliards d'euros de chiffre d'affaires.
A titre de comparaison, la fédération de la grande distribution (FCD) estime le poids de son secteur à 225 milliards d'euros.
Parmi les grossistes, des géants mondiaux, comme les spécialistes du matériel électrique Sonepar (33,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires) ou Rexel (environ 20 milliards d'euros de chiffre d'affaires), mais aussi "entre 80 et 85% de TPE et PME qui représentent autour de 40% des effectifs", selon Philippe Barbier.
Ce sont des grossistes qui approvisionnent les pharmacies, les garagistes automobiles en pièces détachées, ou les chantiers du BTP. Ce sont aussi eux qui fournissent les bars en boissons et les restaurants en produits, bruts ou transformés.
La Fedalis, fédération professionnelle des grossistes en produits alimentaires conservés sous température dirigée ou surgelés, revendique à elle seule 10 milliards d'euros de chiffre d'affaires et 20.000 salariés dans 200 entreprises.
Sur cette partie de l'activité de grossistes, quid donc de la loi Egalim et de la rémunération des producteurs agricoles?
"La restauration n'applique pas la loi Egalim, l'exportation n'applique pas la loi Egalim, les grossistes n'appliquent pas la loi Egalim et beaucoup de filières agricoles elles-mêmes ont demandé à s'extraire de l'application de la loi Egalim", observait en février le médiatique représentant du leader de la grande distribution alimentaire, Michel-Edouard Leclerc, citant aussi le marché de Rungis sur RTL.
Mobilisation sur les Jeux olympiques
La CGF, qui outre la Fedalis compte parmi ses 30 fédérations celle des marchés de gros en France (FMGF), plaide que dans ses métiers, "le prix n'est que le critère N.3, 4 ou 5 pour nos clients", contrairement à la grande distribution où c'est "la seule chose qui compte puisque c'est leur façon de communiquer, le prix bas et la défense du pouvoir d'achat".
Les clients de grossistes seraient eux moins regardant sur le prix, privilégiant "la qualité et la régularité de livraison" pour les produits frais, "la profondeur et la largeur de gamme" pour les produits transformés.
La CGF s'attend à être auditionnée par la mission parlementaire chargée de réfléchir à l'évolution du dispositif Egalim.
En attendant, sa directrice générale Isabelle Bernet-Denin a dit jeudi que l'un des autres gros chantiers pour la profession serait les Jeux olympiques, au sujet desquels elle dit participer à "toutes les réunions".
Les grossistes, qui doivent "anticiper le plus possible les questions de livraison, de périmètre de sécurité, d'accréditations, de voies réservées...", joueront un rôle important pour livrer en temps et en heure hôtels, restaurants ou cafés pressés de servir les clients venus pour les jeux.
