Le lobby de l'agroalimentaire Ania fragilisé après le départ de deux gros adhérents

L'association nationale des industries alimentaires (Ania), un des principaux lobbys du secteur, a accusé coup sur coup les départs de deux gros contributeurs, les industriels du lait et les brasseurs, ont indiqué ces derniers mardi à l'AFP, confirmant des informations du média Contexte.

La Fédération nationale des industries laitières (Fnil), qui rassemble 100 entreprises dont les poids lourds Lactalis, Danone, Savencia et Bel, a expliqué à l'AFP avoir envoyé sa "lettre de démission" fin mai. Premier contributeur de l'Ania ("entre 15% et 20% du budget"), l'organisation en reste membre jusqu'au 31 décembre 2024.

"On ne vise pas le candidat" à la présidence de l'Ania, qui doit être élu le 20 juin, affirme le président-directeur général de la Fnil, François-Xavier Huard, dans un entretien.

Toutefois, "on n'a pas vu émerger de vision partagée, de programme structuré et d'action concrète qui nous permettrait de penser que la situation va évoluer prochainement" dans le sens d'un accroissement de l'"influence" de l'Ania auprès des décideurs.

"On a besoin d'un porte-parolat de l'agroalimentaire qui soit fort", ajoute M. Huard, qui a "constaté une baisse du service rendu [aux] adhérents".

Il n'exclut pas un retour dans le giron de l'Ania en fonction de "comment les choses évoluent".

Contacté par l'AFP, le syndicat professionnel Brasseurs de France a confirmé son départ de l'Ania à la fin de l'année, sans faire de commentaire.

Sa déléguée générale Magali Filhue a indiqué à Contexte que cette décision était "indépendante du renouvellement de la gouvernance à venir" de l'Ania et de "toute annonce récente".

L'actuel président de l'Ania, Jean-Philippe André (Haribo France), n'a pas souhaité se représenter.

Le seul candidat déclaré à sa succession est Jean-François Loiseau, cultivateur du Loir-et-Cher, président de la coopérative Axéréal et de l'Association nationale de la meunerie française, membre de l'Ania. M. Loiseau est aussi à la tête de l'interprofession Intercéréales, qui rassemble agriculteurs, exportateurs et meuniers.

Sollicitée par l'AFP, l'Ania n'avait pas réagi mardi en fin d'après-midi.

Ces défections surviennent à un moment tendu financièrement pour l'organisation: elle a été sanctionnée en janvier à hauteur de 2,7 millions d'euros par l'Autorité de la concurrence dans une affaire d'entente autour de la communication sur la présence de bisphénol A dans les conserves et canettes. Jean-Philippe André avait indiqué qu'il contesterait la décision.

Longtemps tête de pont de l'agroalimentaire en France, l'Ania doit de plus en plus composer avec d'autres lobbys du secteur.

La Coopération agricole défend les intérêts des coopératives, l'Institut de liaison des entreprises de consommation (Ilec) rassemble de grands groupes de l'alimentaire mais aussi de l'hygiène-beauté (Herta, McCain, L'Oréal...), la Fédération des entreprises et entrepreneurs de France (Feef) représente des PME et ETI.

Il y a aussi depuis peu Pact'Alim, qui se présente comme porte-parole des PME et ETI françaises de l'agroalimentaire, dont Bonduelle, Daunat et Andros. C'est le nouveau nom de l'Association des entreprises de produits alimentaires élaborés (Adepale), qui avait quitté l'Ania en 2020 (après déjà une brève rupture en 2010 sur fond de cotisations jugées trop élevées). L'Adepale jugeait alors l'Ania trop tournée vers les problématiques des multinationales.

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